De la société de consommation à la société d’addictions

Dans le « Que sais-je ? » sur les addictions, écrit par Mathilde Saïet dans son édition revue en 2023 (Presses Universitaires de France), le chapitre 2 commence ainsi : « Au-delà des dépendances classiques à des substances (drogues, tabac, alcool, psychotropes), on peut relever une multitude de conduites qui entraînent des dépendances, sans la présence de toxiques. On peut ainsi être addicté aux aliments (boulimie) ou à l’absence d’aliments (anorexie), aux jeux d’argent et vidéo (la cyberdépendance), aux achats, à la sexualité, au travail, au sport, à une relation amoureuse – ou à l’amour en général –, à la psychanalyse… Ou encore : aux scarifications (automutilations), aux actes criminels (meurtres en série), au suicide. Certaines formes de cleptomanie, ou de trichotillomanie (arrachage compulsif des cheveux) ont pu également être considérées comme des conduites addictives. » Ainsi se pose la question suivante : serions-nous passé de la société de consommation à une société d’addictions ? Les économistes le savent bien, cela fait un bon moment, peut-être plus d’un siècle, que ce n’est plus la demande qui crée l’offre mais l’offre qui crée la demande. Il semblerait qu’aujourd’hui, dès lors que l’on cumule les trois critères pour être diagnostiqué addict (1/ être contrôlé par l’objet plutôt que de contrôler l’objet, 2/ essayer d’arrêter à répétition une habitude mais ne pas y arriver, 3/ faire face à des conséquences sociales néfastes de l’activité dont on est dépendant), alors une multitude sans cesse plus vaste de personnes sont addicts. J’ai déjà écrit ailleurs que l’addict, c’est le client idéal de l’économie de marché : fidèle jusqu’à la mort s’il le faut, près à tout sacrifier pour acheter, soumis au diktat du produit ou de l’activité sans limites.

La pilule emblème de la surconsommation

Ce passage de la société de consommation à la société d’addiction est un marqueur du vingt-et-unième siècle. L’emblème totémique de cette société d’addiction, c’est probablement cet objet social total qu’est notre téléphone portable. Capable de presque tout, il est avant tout conçu pour qu’on y passe le plus de temps possible. Bien sûr il nous rend grandement service, et moi même y passe mon lot de temps à y faire des activités diverses, mais il y a une certaine tristesse qui s’empare de moi lorsque dans les transports en commun, les salles d’attentes, on voit des scènes comme des mères qui allaitent leur bébé le portable à la main. Qui plus est, des parties de la population, fragiles et vulnérables (les personnes âgées, des personnes handicapées), ont du mal en à adopter l’usage, parfois obligatoire. Pa exemple quand on doit scanner des QR Codes pour des démarches administratives. Cet outil que nos ancêtres pas si éloignés auraient qualifiés de magique devient notre prison tragique.

Addiction téléphone portable
Noyade numérique par étouffement applicatif

Elon Musk, via sa société « Neuralink » vient d’annoncer l’implantation avec succès d’un implant cérébral dans le cerveau d’une personne tétraplégique, sans communiquer sur la procédure ni publier le moindre papier scientifique à ce sujet. Cette personne dispose désormais d’une prise USB dans le cou. Moi, ça m’inquiète. Je ne suis pas et ne serais jamais une machine programmable, ni même piratable à souhait par des personnes mal intentionnées. Dès lors que les être humains seront connectés à des machines elles même interconnectées via le réseau, des dangers éthiques considérables se présenteront. Est-ce que la guerre du futur se fera derrière des écrans à piloter des soldats lobotomisés pour qu’ils s’entretuent par l’action de codeurs plus ou moins astucieux ? La science fiction rattrape tellement vite le réel qu’il semble de plus en plus difficile d’imaginer la suite. Pour ma part, je tiens à l’intégrité de mon corps, comme protégé par la loi, inviolable et inaliénable, sur lequel je dispose pleinement de mes droits, en pleine conscience et digne jusqu’à la mort et après.

L’immense majorité des serveurs du monde fonctionnent sous une version de Linux, un système libre et open source, beaucoup plus stable que Windows ou Mac OS dédiés aux usagers ordinaires.

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