La réduction des risques en addictologie

Voici ma note de lecture de l’ouvrage suivant : Morel, A., Chappard, P. & Couteron, J. (2012). L’aide-mémoire de la réduction des risques en addictologie: En 22 notions. Dunod.

Voici un ouvrage qui porte encore mal son titre, car en lieu et place des « fiches » annoncées par l’éditeur, on y trouvera de véritables chapitres, rédigés soigneusement, avec clarté et pertinence. Il est par ailleurs incohérent de parler d’aide-mémoire lorsque l’ouvrage fait 360 pages. Au delà de cette critique adressée à l’éditeur, c’est une lecture intéressante, qui permettra à tout public de se familiariser avec une approche théorique à la fois ancienne et récente, car la France n’a pas encore accompli l’ensemble des démarches permettant à la réduction des risques de devenir systématique. Cependant, le paradigme de la réduction des risques demeure la clé de voûte des CSAPA et des CAARUD, les deux institutions qui tissent un réseau national de prévention, de soin et d’accompagnement en addictologie. J’ai pris 10 pages de notes personnelles dans un fichier word, ce qui me permettra de mémoriser dans la durée les éléments que j’ai jugé les plus utiles pour moi.

Voici quelques extraits emblématiques :

« Le concept de réduction des risques, homogène en apparence, recouvre une diversité de conceptions philosophiques et politiques. Le référentiel de santé publique qui lui correspond se fonde sur certains concepts et valeurs : le renoncement à un idéal d’éradication des drogues, la démarche de proximité (aller à la rencontre et prendre l’usager là ou il en est dans son parcours), le non-jugement moral des pratiques d’usage ainsi que la responsabilité et la participation des usagers. » page 38

« La réduction des risques s’inscrit dans une démarche pragmatique de santé publique qui considère que les contextes de consommation sont au moins aussi déterminants que les produits eux-mêmes. Elle prend en compte la dimension de la trajectoire de l’usager de drogues et ses conditions d’existence (Jauffret-Roustide, 2009). Elle propose d’apprendre à « vivre avec les drogues » en domestiquant leur usage et en promouvant la notion de mesure en complément de la seule abstinence (Ehrenberg, 1996). Le contexte de consommation devient la cible d’une palette d’intervention qui propose, selon la demande de l’usager, de consommer à moindre risque, de diminuer sa consommation ou de se sevrer. » page 39

« Dans le domaine des toxicomanies, l’arrivée de la Réduction des Risques et l’introduction des traitements de substitution aux opiacés ont largement modifié la place du sevrage et le moment pour le réaliser. Il est à présent une proposition parmi d’autres et non plus la seule : une étape, un moment dans l’accompagnement proposé, une issue possible. Certainement pas une finalité. » page 292

Et pour conclure, voici un autre extrait, dont le contenu peut s’appliquer à l’ensemble des disciplines qui ont pour mission de prendre soin de l’autre en souffrance : « La clinique, médicale à l’origine, signifie « apprendre au lit du malade ». La clinique est donc l’étude du fonctionnement individuel, de ce qui est observable et qui, par l’insistance de traits qui se répètent, devient objet d’une théorisation identifiant ce qui deviendra paradigmatique, constituera un fait clinique jusqu’à faire l’objet d’un dispositif d’observation et de traitement. Une clinique médicale, au lit du malade, examine le patient, établit un diagnostic et en déduit le traitement qui fera l’objet d’une négociation et d’une alliance avec le patient, d’un partage de savoir avec lui. » page 311

A titre personnel, je me dois d’ajouter que les traitements de substitutions sont largement plébiscités par l’ouvrage alors que je sors tout juste d’une semaine horrible à cause d’une intolérance personnelle à la buprénorphine, qui est le traitement de substitution le plus prescrit en France. Donc j’aborde avec prudence cette thématique des traitements de substitution à cause de mon expérience (qui n’a qu’une valeur individuelle) très négative en la matière.

L’ouvrage est disponible à la lecture en ligne sur le portail CAIRN.

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