Suite de l’article « Mes déclencheurs, les causes de rechute (1)
3 – La dépression
Il s’agit d’une pathologie sous-jacente aux addictions. De fait, l’addiction vient effacer illusoirement la dépression, c’est une mauvaise réponse à la dépression, dans l’idée qu’il serait mieux de ressentir tout sauf la dépression. Cela rendra l’abstinence très difficile car j’ai peur qu’une fois l’abstinence consolidée, les psychopathologies masquées par l’addiction refassent surface. Ma dépression, ou mon fond dépressif, m’a toujours donné le fantasme de pouvoir d’une manière ou d’une autre réinitialiser le cerveau, comme s’il s’agissait d’un simple ordinateur. Mais le corps ne fonctionne pas comme cela, bien au contraire. Des épisodes dépressifs, j’en fais depuis l’enfance, marquée par un grand sentiment de vide et d’ennui. Petit, je me plaignais souvent de ne pas savoir quoi faire. J’étais habité par ce vide, ce creux, ce trou béant où aucune activité n’était assez attirante pour légitimer de la faire.

Aujourd’hui ma dépression est traitée par des médicaments. Je mesurerai cependant pleinement leur efficacité une fois que l’abstinence sera inscrite dans la longue durée, ce qui n’est pas encore le cas. Autre caractéristique de ma dépression, commune à beaucoup de monde : elle est saisonnière et s’étend en général de début novembre à début mars. Des idées noires, des fantasmes de suicide et me voilà de nouveau en territoire dépressif. Et si la dépression est bien une cause de rechute, j’ignore la cause profonde de la dépression, n’excluant pas le facteur non héréditaire de la génétique ou de l’épigénétique.
4 – L’angoisse
Je n’ai pas d’objet d’angoisse clairement identifié. Il s’agit plutôt d’une angoisse pure, venue du fond lointain de l’esprit et du corps. Bien sûr, il existait durant mon enfance et mon adolescence des situations facile à identifier pour expliquer les montées d’angoisse : une forme de phobie sociale, les examens, les situations nouvelles, sortant de la routine, les changements de plans d’activité inopinés. L’angoisse possède des degrés d’intensité variable. Elle se manifeste comme un son fondamental, un bourdon, qui ne s’arrête jamais, tel une chambre magmatique attendant l’éruption volcanique. L’angoisse m’a confiné à la solitude, en particulier au collège, où j’ai été victime de harcèlement scolaire à une époque où personne n’en parlait dans les média. Elle s’est poursuivie au lycée où, enfin libéré de mes bourreaux psychique, j’adoptai une posture de solitude extrême afin d’avoir la paix, ne cherchant pas à me faire des amis. A l’université cependant, les choses ont changé. J’ai adhéré à un syndicat étudiant et je me suis fait plein d’amis, situation que j’ai trouvé, compte tenu de mon passé, assez incroyable.

Addict à l’actualité, je n’ai réalisé que très récemment, avec l’intensification des problèmes du monde, que cet intérêt pour ce qu’il se passe à l’extérieur de nos foyers, dans la société nationale et internationale, était pour moi très anxiogène. J’ai très mal vécu le déclenchement de la guerre en Ukraine, et actuellement, le massacre en cours à Gaza. Pour me protéger, je n’écoute le journal qu’une fois par jour et à la radio. Cela me protège des images traumatisantes des cadavres amoncelés par la guerre et des faits divers sordides qui alimentent l’audimat des chaines d’information en continu.
L’angoisse est une cause diffuse, très imprévisible de rechute. Je pense aussi que c’est l’une des causes sur laquelle j’ai le plus de prise afin d’en limiter les effets néfastes. Nous en reparlerons.


